Martin Jouanneau VIRAGE

Mon roman VIRAGE est disponible en format ebook sur amazon et en version papier sur demande à:

martinjoino@gmail.com

L’itinéraire d’un curieux de la vie.

Un être humain sincère, épris de liberté et de justice, qui cherche la clef du bonheur et le sens de la vie dans ses moindres recoins, à travers l’échange, la générosité, l’amitié, la vérité, et qui, malgré l’égoïsme, la vanité, la paternité maladroite, les passions et les addictions, le matérialisme jusqu’à l’écœurement puis le dénuement, les certitudes et les incertitudes, politiques et philosophiques, la quête de la beauté et de l’élévation dans la musique et la littérature, élude l’indifférence bourgeoise et caresse l’espoir d’atteindre, un jour, la sagesse qui éloigne l’amertume et commande de s’en tenir à la satisfaction du devoir accompli sans aucun souci de reconnaissance.

J’avais publié un extrait en avril 2021 (cet ouvrage est le fruit de plus de 4 ans de travail) ici.

Merci de votre intérêt.

Ça commence comme ça:

J’avais de l’argent. 

J’avais attendu. 

J’étais libre. 

J’avais frôlé la réussite et la reconnaissance. Sans rien conserver car le business ne me convenait pas. Je cachais mon inaptitude à vendre en jugeant le commerce vulgaire. Je rêvais de vie littéraire et je vendais des produits. Médiocre marchand du temple. 

La phrase d’un prof me revenait. 

« Vous êtes fait pour l’ataraxie. » 

S’asseoir au calme et ne plus bouger.

J’avais voulu jouer au petit patron. Je ne pouvais pas réussir puisque je n’y croyais pas. Le sort de l’entreprise me laissait froid. La plupart du temps je m’en foutais. Les mécanismes du business m’intéressaient. Comme observateur, pas comme acteur. Orgueil. Ou indépendance.

Affronter les clients pour les contraindre à commander, aller sur le terrain ? Je préférais bavarder avec mes collègues que les pousser à vendre. Les stratégies commerciales m’ennuyaient. Ne m’intéres-saient que les aspects humains. 

Je me croyais intelligent. Tout le monde l’était. Il me restait l’empathie, l’affection pour les collaborateurs. Insuffisant. Je ne possédais ni l’envie, ni le tempérament d’un dirigeant. J’étais incapable d’exiger des résultats, de faire une remarque désagréable. Je faisais confiance en espérant que tout se passe bien. Je jouais le jeu, je dissimulais. 

Faire semblant et perdre le sommeil. 

L’imposture.

Bientôt la supercherie serait découverte et je me retrouverais à la rue. 

Un copain souriait : « Trop sensible mon frère. »

Faire illusion un moment. Et puis échouer. 

J’étais soulagé d’en être sorti. Il fallait maintenant savourer chaque seconde de liberté. Ni pression ni souci.

Ne plus dépendre d’un patron agressif et inculte, qui presse et vous juge.

15 ans plus tôt, lors de la vente d’un immeuble, leur seul bien, mes grands-parents avaient touché l’essentiel en cash. Ils avaient remis la valise mystérieuse à ma mère qui n’avait osé y toucher, se contentant d’une vie précaire. Je venais de la récupérer, à l’insu de ma sœur qui vivait en Nouvelle-Zélande. Ma mère me recommandait la prudence. Je n’avais pas l’intention de cacher cet argent pendant 20 ans. Je voulais changer de vie, j’en avais besoin. Je devais me débarrasser des liasses pour éviter les questions sur leur origine. Limiter le risque. Réfléchir et s’organiser. S’éloigner de Paris sans laisser de trace.

Ma femme m’avait quitté, lassée de mon égoïsme. Mon fils ne me parlait plus, résigné à mon indifférence. Le bruit, les cris me fatiguaient. Impossible de se concentrer. Je rêvais de calme, d’espace. J’écoutais de la musique pour échapper au vacarme. Je n’avais pas su rendre heureux mes proches. Irrité, épuisé. Échec à 360°.

A 25 ans, j’aurais acheté des vêtements, des montres, des chaussures. Aujourd’hui je voulais un abri confortable. 

D’abord fuir. Effacer mes traces et sécuriser l’argent. Je me dirigeais vers les Landes, région calme, aérée, chaude. Vers l’ouest avec l’Atlantique comme horizon. L’est m’étouffait. Besoin d’espace pour respirer. J’avais réservé un hôtel à Bordeaux. 3 heures dans le train pour construire l’emploi du temps des prochains jours. J’étais excité, impossible de lire. J’avais vérifié l’épaisseur du billet de 500€ : 0,12mm. J’avais de quoi vivre plusieurs années. Je fermais les yeux pour réfléchir mais j’étais constamment distrait. Aucune de mes rêveries ne durait tant mon esprit virevoltait. Je voulais trouver un logement que je meublerais avec de la musique. 

La musique ! Je rêvais du matériel que j’allais acheter dans les prochains jours pour m’envelopper d’un son parfait. Je voulais baigner dans la musique, m’y noyer. Reproduire la musique pour qu’elle enchante la maison mieux que les plus beaux meubles. La musique me rendait heureux, l’émotion m’emportait. J’avais dans la tête une liste de matériel. J’irais jusqu’à New York s’il le fallait pour écouter et sélectionner ce qu’il y avait de plus beau, de plus fidèle à la musique. Quel que soit le prix. 

Je me voyais installé sur un balcon dominant la plaine, en train de lire un volume de Mémoires. Tant de classiques à découvrir, Journaux, Mémoires, Souvenirs. L’autobiographie condensait la vie, le roman délayait. Dans l’autobiographie je cherchais le secret des écrivains. 

Je voulais marcher dans la campagne. Contempler l’horizon. Humer la nature. Oublier l’heure, s’allonger dans l’herbe et regarder le ciel, guetter le lever du soleil, attendre son coucher. Respirer profondément sans souci du lendemain. Marcher le long de la forêt, vers l’océan, chaque jour. Se laisser porter par le paysage. Rêver. Lire, écouter de la musique, écrire un livre. Le beau livre définitif.

Libre.

J’attendais ce moment depuis toujours. Je pouvais enfin me concentrer. 

Le besoin physique d’écrire s’imposait chaque jour. Une journée sans écrire m’assombrissait. Je n’éprouvais de paix qu’après quelques lignes satisfaisantes. J’avais toujours imaginé le livre définitif de la rêverie. Voyage dans la lumière et la douceur, le ciel, l’horizon lointain de la campagne silencieuse, un bien-être qui condensait les souvenirs d’instants magiques de l’adolescence, l’insouciance et l’espoir d’une vie heureuse avec l’amour d’une fille sensible, petite fée. Je portais ce livre sans trouver le ton juste. J’avais essayé mille fois. Au bout de quelques phrases, je bloquais. Trop compliqué, trop vague. Je tournais en rond, je me répétais. J’accumulais les pages. Je recommençais la même histoire année après année, sans oser relire. 

J’avais renoncé au livre de l’adolescence. 

J’inventais une autre vie. J’écrivais d’abord pour échapper au monde, pour m’envoler loin, vers le bonheur. 

J’écrivais dès que j’étais seul, surtout en voyage. En train l’ordinateur restait sur mes genoux. À l’hôtel je gardais l’ordi sur le lit. J’éteignais, je réfléchissais à ce que je venais d’écrire. Une nouvelle idée venait et j’allumais pour l’ajouter. J’éteignais et 2 minutes plus tard je recommençais. J’écrivais ainsi jusqu’à 4 ou 5 heures, excité par ce qui me venait à la tête, trop impatient de matérialiser mes folies pour souhaiter dormir. Je ne sentais pas la fatigue. Le lendemain je me levais la tête lourde et les idées sombres. La journée s’annonçait longue et pénible. L’énergie manquait pour argumenter avec les clients. C’était toujours pareil. Mais, le soir, dès que j’entrais dans ma chambre, l’envie de plonger dans le monde imaginaire revenait et je reprenais mon récit. Lorsque j’étais à l’étranger pour une semaine je profitais de chaque nuit de décalage horaire pour écrire et je terminais le séjour épuisé. Je causais probablement des dégâts irréparables à mon cerveau. 

J’écrivais une confession à un être compréhensif. Je n’adoptais pas le ton de quelqu’un qui raconte une histoire à haute voix au restaurant. Je chuchotais à l’oreille d’un ami. 

Dans ma vie libre je travaillerais sur ce livre sans distraction. 

Pourtant je ne pouvais pas tout miser sur l’écriture, j’avais connu des désillusions. Il ne fallait pas se fixer d’objectif ambitieux. Il était temps de savourer la vie au fur et à mesure, minute par minute. Arrêter de courir, de s’épuiser à toujours vouloir aller de l’avant, à chercher ailleurs sans profiter de l’instant. Je voulais aussi créer de mes mains. Construire des enceintes. Fabriquer des boites à musique me rendait heureux. Assembler des morceaux de bois et quelques haut-parleurs, brancher et la musique jaillissait, miracle. Je voulais fabriquer des grosses enceintes parfaites pour le rock…

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